par Nelly Broissin

Pas de cure analytique sans transfert !!



La règle psychanalytique fondamentale: "Dites ce qui vous passe par la tête"  (Freud, S. (1912). Conseils aux médecins sur le traitement analytique in La Technique Psychanalytique) est la seule règle énoncée par la psychanalyse inventée par Freud. C’est à partir de ce moment d’énonciation et s’il est accepté par celui qui vient en analyse, qu’un travail peut s’inaugurer sous transfert. Le dispositif analytique est particulier, il met en jeu un analyste et un analysant, tous deux dans une supposition d’un savoir insu, qui est déjà là, au lieu de l’inconscient. Quelque chose cherche à se dire à travers la parole du sujet à son insu, qui appelle un déchiffrage, une interprétation. La présence de l'analyste devra s'adapter à ce mouvement et son interprétation s'adresser au sujet de l'inconscient et non pas au moi, en tant que dans l'inconscient il y a un savoir qui ne se clôture pas.

Dès qu’il y a quelque part le Sujet Supposé au Savoir, il y a transfert   (Lacan, J. (1964). Séminaire XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse) C’est-à-dire qu’un savoir opère dans la dynamique de la cure comme fiction qui permet que quelque chose puisse se dire. Le transfert, c’est le moteur de la cure, c’est ce qui met au travail le parle-être dans des manifestations de désir inconscient et de résistance. Le transfert est à la fois levier et obstacle nous dit Freud (Freud, S. (1912). La dynamique du transfert in La Technique Psychanalytique) mais c’est aussi ce qui rend quelque chose d’accessible à l’analyse. Ainsi ce qui s’instaure, dans ce moment inaugural c’est la confiance, le don de l’analysant à l’analyste de quelque chose qui a un prix inexprimable nous dit Lacan lors de ce même Séminaire.

Des sujets viennent à l’analyse avec leur plainte et cela ne consiste pas à ramener cette déviance à la norme, mais au contraire à l’autoriser. Il s'agit pour l'analyste de savoir accueillir et écouter ce qui se dit, savoir mettre en tension, articuler ce qui s'énonce difficilement, indiquer au sujet qu'il mérite d'être écouté.

L’acte analytique, c’est libérer l’association, c’est-à-dire la parole, la libérer de ce qui la contraint,  c’est d’obtenir le plus singulier de ce qui fait son être pour finalement assumer de dire : Je suis ça, qui n’est pas bien, qui n’est pas comme les autres, que je n’approuve pas, mais c’est ça !! L’analyse, c’est celle qui se met dans le sillage du désir et qui vise à isoler, pour chacun, sa différence absolue, la cause de son désir dans sa singularité. La position de l'analyste sera d'accuser réception de sa construction, de tenter de border cette jouissance, d’accueillir, d’être un autre de l'adresse pour permettre au sujet de créer sa solution.



Travailler avec le symptôme et pas contre le symptôme !!



A la question, le vrai sens du symptôme c'est quoi ?   Freud a répondu c'est le désir, l'accomplissement du désir comme insatisfait, d'un vœu inexaucé, une formation de compromis en raison du rôle des mécanismes de défense. Le mot symptôme prend alors avec la psychanalyse un sens nouveau (différent du sens médical) comme l’expression d’un accomplissement de désir.

Pour Lacan, le symptôme n’est pas le signe d’un dysfonctionnement mais « il vient du Réel, il est le Réel » (Lacan, J. (1958). Séminaire V, Les formations de l’inconscient). C’est ce que les gens ont de plus réel, il est l’effet de structure du sujet. Le symptôme est la façon dont chacun jouit de son inconscient en tant que son inconscient le détermine (Lacan, J. (1975). Séminaire XXIII, Le sinthome). Il vient dire quelque chose de la vérité du sujet, que le sujet sait sans savoir, il serait l’équivalent d’une parole, enclose, à entendre et à déchiffrer. Le symptôme est un mode de jouir du sujet où le corps est mis en jeu, le sujet y met son être, sa chair.

Le symptôme représente « quelque irruption de la vérité » (Lacan, J. (1966). Note sur l’enfant in Autres Ecrits). Le symptôme est articulé comme un langage (Lacan, J. (1953). Rapport de Rome), au même titre que l’inconscient, c’est ce qu’il y a de singulier dans chaque individu. Ce n’est pas une formation de l’inconscient mais a avec l’inconscient un rapport bien plus complexe, différent en tout cas. C’est ce qui ne chute pas, mais ce qui se modifie, se change pour que restent possible la jouissance, le désir.


La différence majeure d'une expérience analytique, c’est que ce n'est pas une psychothérapie, on ne vise pas le mieux-être, ni la guérison (elle vient de surcroît disait Lacan), ni à supprimer le symptôme, on touche plutôt au plus près de l'incurable. Si le travail analytique n’est pas de rectifier un symptôme, il se propose comme moyen pour un sujet d’en découdre avec sa jouissance pour s'autoriser à son désir et de construire sa place dans le monde, au cas par cas, au un par un !!